Témoignage Clémence

J’ai traversé deux fois dans ma longue vie des relations avec des hommes qui ont été marquées par la violence, tant physique que psychologique. La leur et la mienne, à parts égales. J’ai eu la chance d’en sortir indemne physiquement sinon émotionnellement. La seconde fois l’homme rencontré était charmant. Il avait beaucoup pour me plaire.

Je n’ai pas écouté l’instinct qui m’a dit d’emblée de me méfier. Et je n’ai découvert que peu à peu que cet homme là mentait sur bien des aspects de sa vie, notamment ceux liés aux femmes. Que cet homme là ne tenait pratiquement jamais sa parole et qu’il savait profiter de ses compagnes, économiquement notamment mais pas seulement. Que cet homme là, habité par un narcissisme forcené et une sorte d’indifférence à l’autre, n’écoutait pas la femme qu’il avait en face de lui.

Faute de comprendre mon malaise et où situer la faille, je suis devenue rapidement violente. Utilisant ma facilité verbale pour rabaisser l’autre, le provoquant physiquement sans, à ma surprise, rencontrer résistance ni réactions. Il était comme blindé de l’intérieur. Les deux ou trois fois où sa violence est sortie, elle a été extrême, avec menaces de me tuer et comportements dangereux.

Consulter pour me confronter à ma violence a été un pas décisif. Dans la relation marquée par la violence trente ans plus tôt, c’était mon partenaire qui avait suivi une thérapie, c’était lui que la relation avait désigné comme l’auteur, lui le « coupable ». J’étais la « victime ». Cette fois-ci, je me suis confrontée à ma part agissante, celle qui provoquait, qui se mettait même volontairement en danger.

La relation a duré, avec des interruptions de plusieurs mois, deux ans et demi. Deux ans et demi où je me suis entêtée, me heurtant constamment à un mur en tentant vainement de me faire entendre.

Plusieurs facteurs m’ont permis d’arrêter. Les consultations m’ont permis de comprendre que je n’étais pas entendue, elles m’ont permis aussi de mieux mesurer le risque encouru, de sentir que j’étais moi aussi sinon blindée, en tout cas anesthésiée face au danger encouru et que je faisais encourir à l’autre. J’en ai pris conscience, je me suis mise à avoir peur. De lui, de moi. Mais je n’ai pas voulu entendre ceux et celles qui m’enjoignaient de mettre fin à cette relation.

Et puis il y a eu la rencontre avec un proche de mon partenaire. Il m’a dit spontanément que mon ami, cet homme charmant, n’était pas un type bien mais que c’était le problème des femmes si elles restaient avec lui, pas le sien. Je me suis dit « il a raison ». J’avais trouvé en ce proche de mon ami un allié, un homme qui avait su le démasquer et qui acceptait de le dire pour m’aider.

Clémence (prénom d’emprunt)